Sur ce même blog -déserté à regrets ces derniers temps- une question revient régulièrement, entre les lignes : que reste-t-il du passé dans les vicissitudes du présent ? Cette question métaphysique traverse certaines existences plus que d'autres et certains groupes y font explicitement écho le plus long de leur carrière. Il en va notamment ainsi pour Duesenjaeger, une formation discrète mais constante de la punkerei d'ascendance ouest-allemande. Débutant en 2001, période où l'essoufflement du son des années 90 pointait déjà rétrospectivement son nez, que ce fûsse pour le "grand frère" américain ou pour les plus frustres et traditionnels allemands, le groupe a toujours eu une inclination pour la mélancolie et une certaine tristesse désabusée. Passé les brillants 'Las Palmas OK' et ' Schimmern', plus rien ne semblait devoir être dit. C'est donc une agréable surprise de voir que la reprise inattendue avec 'Leben lieben sterben' en 2012 n'était pas qu'une étincelle isolée au milieu de braises encore chaudes, mais bel et bien et un nouvel élan dans le parcours des Munsteriens. 'Treibsand' pourtant ne quitte pas les vieux démons chers au quartet, et ces sables mouvants semblent bien évoquer les sables du temps avant tout.
On retrouve ainsi le "son Duesenjaeger" typique avec une production le mettant nettement à son avantage. Les rythmiques sont toujours simples, pour ne pas dire ramonesiennes, avec une basse cimentant de façon entraînante l'ensemble, et les guitares sont toujours tristes mais avec un certain entrain. L'impression générale emprunte de façon ostentatoire au post-punk le plus confiné mais aussi parfois à des registres bien plus noirs (à la limite du DSBM, sérieux) avec toutefois une couche sous-jacente de colère et de revendication propre au deutschpunk. Sous le vernis policé, gentiment inoffensif, on peut toujours voir les vestiges d'un passé bien plus brûlant, plus palpable sur 'Kreislauf' délibérément 80er dans son approche. Une sorte de colère froide et désabusée émane majoritairement d'un ensemble bien homogène. Du Duesenjaeger 16 ans d'âge, en somme.
Le point le plus cryptique pour le profane restera sûrement cette fois encore le chant, bien trop détaché malheureusement sur certains passages ('Rastlos und kalt'), et ce malgré un grand renfort de chœurs dynamiques. La quasi-perfection est ratée de peu, mais il est délicat de faire vivre des des textes dénués au final de toute chaleur. Critique, désabusé mais n'ayant toujours pas capitulé face à notre monde réjouissant, le constat proposé par la voix de Tobi Neumann est juste mais dur. 'Tief', 'Wie lange noch' 'Sinflut' en sont les exemples-types. "Nach uns die Sinflut"
Au final, un très bon album d'un groupe qui a su faire mûrir sa formule sans jamais se départir de ses fondamentaux. A l'image de sa sinistre parce que désincarnée mais ô combien concrète pochette, 'Treibsand' tape juste sans trop en faire.
https://duesenjaeger.bandcamp.com/album/treibsand-lp
Recommandé :
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- 'Jauch taucher' et son attaque ramonescore ultra-efficace
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